Comment faire de l’utopie Planétisme, décrite initialement dans une note en 2008, une réalité ?
Mais d’abord, pourquoi écrire cet article ? Parce que nous voyons monter de toutes parts les crises sociales, sociétales, politiques, géopolitiques, environnementales,… nous ressentons la fragilité du système économique et surtout nous ne voyons pas de solution émerger ni de la part des politiques nationaux, dépassés et de moins en moins représentatifs, ni des instances de gouvernance mondiale (ONU, G20,…), ni des autres formes de représentation (pouvoirs locaux, ONG, associations, …) qui peuvent être efficaces dans leur domaine mais qui sont insuffisamment coordonnées pour répondre globalement à ces crises. Pour ma part, à mon modeste niveau, je m’informe sur tout cela, cherche et me forme à des solutions, agis et participe à divers mouvements cherchant à améliorer les choses… et j’en conclus que malgré beaucoup de bonnes volontés et de bonnes idées, les crises empirent et aucune solution à la hauteur de la gravité et de l’urgence de la situation n’émerge. Alors, je jette une bouteille à l’eau…
Cette bouteille qui flottait sur la mer du Web et que vous avez repêchée comporte la carte ci-dessus que je vais vous déchiffrer. Ce texte vous paraîtra peut-être par endroits présomptueux, les propositions irréalistes, ou l’ensemble trop complexe à réaliser. Ceci est inévitable compte tenu de l’énormité du sujet traité. Mais nous avons le choix entre ne pas croire au constat ci-dessus, ou y croire et être fataliste, ou y croire et chercher une solution, ou .... C’est ce troisième choix qui s’exprime ici.
Cette carte reprend les quatre axes initiaux du Planétisme de 2008 : Humanisme, Développement Durable, Vrai Mondialisme et Valeurs communes, enrichis depuis par des lectures, formations, expériences et réflexions.
Humanisme
Etre humaniste consiste à commencer par s’aimer soi-même, sans égocentrisme, afin d’être bien dans sa peau pour pouvoir mieux s’occuper de l’autre (1). Bien s’occuper de l’autre consiste d’abord à le comprendre, or il peut être très différent de soi sur le plan culturel, générationnel, psychologique et des valeurs. La bonne nouvelle est que des chercheurs en sciences humaines ont découvert et vulgarisé des moyens pour comprendre ces différences, moyens déjà utilisés avec succès (2). Une fois que l’on a compris l’autre, il faut accepter sa différence pour pouvoir le respecter, ce n’est pas encore de l’amour mais cela en prend le chemin… Ensuite, pour que l’homme soit vraiment humaniste, il doit apprendre à vivre la différence avec l’autre, par exemple apprendre à coopérer en tant qu’occidental blanc chrétien matérialiste avec le voisin immigré de couleur et musulman, vivant en communauté. Il y a de nombreux exemples qui démontrent que c’est possible et des méthodes qui montrent comment faire (3).
Comment développer cela à grande échelle ? Par un leadership éclairé, c’est-à-dire par la présence de leaders influençant d’une façon désintéressée les autres, pour leur bien et pour le bien de la communauté (4).
La propagation et la montée en puissance d’un tel humanisme est complexe et nécessite un immense effort d’éducation. Beaucoup de démarches dans ce sens sont en cours, mais qui paraissent dérisoires face à l’égoïsme et l’égocentrisme qui dominent le monde. La puissance nécessaire à cet immense changement proviendra de l’émergence de Valeurs Communes (a) et du Vrai Mondialisme (e), thèmes traités plus loin, mais aussi grâce à votre action personnelle en mettant en pratique les recommandations ci-dessus ou tout autres allant dans le même sens.
Développement Durable
Ce n’est pas parce que cette expression est maintenant galvaudée, que nous ne devons pas continuer à l’utiliser. Elle est galvaudée parce que cette notion a été récupérée par le système capitaliste sous forme par exemple de rapports RSE (Responsabilité Sociale et Environnementale), obligatoires pour les entreprises d’une certaine taille, rédigés sous le contrôle des hommes de communication. Certes, cela est mieux que rien et a permis de faire quelques progrès. Certes certaines entreprises vont au-delà du minimum légal. Mais cette récupération donne bonne conscience aux acteurs du système et étouffe le véritable Développement Durable extrêmement et urgemment nécessaire.
La solution dans le cas des entreprises est l’intégration du Développement Durable dans leur stratégie et leur management (5) ou, pour employer des termes plus séduisants pour le monde de l’entreprise, la Performance Globale :
- performance économique : à considérer comme un moteur et non comme une finalité,
- performance sociale : mettre l’homme au centre des préoccupations,
- performance sociétale: se soucier de l’impact de l’entreprise sur la société,
- performance environnementale : préservation de l’environnement et économie des ressources,
- et tout cela en synergie.
Une lueur d’espoir est que de plus en plus d’entreprises se rendent compte que leur modèle économique ne sera plus viable très longtemps à cause de l’épuisement de leurs ressources et qu’elles vont devoir changer de paradigme(6).
La même approche est aussi nécessaire pour toutes les autres organisations humaines : familles, associations, collectivités territoriales, pays, ainsi que sur le plan macro-économique. A été publié à ce sujet sur ce blog un résumé de l’excellent modèle proposé par l’économiste anglais Tim Jackson : la prospérité sans croissance (7). A noter aussi la proposition de Sandrine Mathy de faire converger dans les pays en développement la satisfaction des besoins fondamentaux (alimentation, habitat, santé…) avec la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la réduction à la vulnérabilité aux changements climatiques, financé par le Fonds Vert (8).
Mais tout cela n’est pas nouveau, voilà des dizaines d’années que l’on parle de Développement Durable et que de nombreux acteurs alertent et agissent, et que sa véritable mise en pratique reste minoritaire ! Le passage à l’action globale et coordonnée viendra grâce à L’Humanisme (b), au Vrai Mondialisme (c) et au partage de Valeurs communes (d), mais d’abord par votre action personnelle en étant exemplaire dans ce domaine.
Vrai Mondialisme
Ce 3è pilier du Planétisme intègre les notions de représentation des communautés, de gouvernance de ces communautés et de leur territoire, à tous les niveaux jusqu’à celui de la Planète. Le monde est devenu inextricablement intégré par le biais de la mondialisation de l’économie, des trafics, de la communication et des problèmes environnementaux. Nous n’avons pas d’alternative, nous devons nous organiser pour vivre Tous ensemble. Et il est évident, qu’à tous les niveaux, de nombreux systèmes de représentation des peuples et de gouvernance ne fonctionnent pas. Par exemple le système politique et administratif français est par beaucoup d’aspects non adapté, de nombreux conflits dans le monde sont issus de l’existence de frontières artificielles déconnectées des réalités culturelles et ethniques, la gouvernance mondiale dominée par les égoïsmes des états ne résout ni ces conflits, ni les problèmes environnementaux qui sont globaux et vitaux, etc … etc …
Soit nous mettons en place un nouveau système politique de dimension mondiale efficace, soit la vie infernale vécue par certains sur Terre va rapidement se propager à nous tous !
Voici donc des éléments d’une solution qui sera à la fois locale, multiforme, globale et progressive :
- structure en réseau représentant, au fur et à mesure de leur intégration dans le Vrai Mondialisme, tous les hommes, par le biais de leur communauté et de leur territoire,
- cellules de base de maximum 10-20 personnes, pour que tous les membres s’y connaissent bien et pour faciliter l’entraide (9),
- communautés de maximum 200 personnes, pour que tous les membres s’y connaissent au moins de vue et pour faciliter l’entraide (9),
- démocratie plus représentative, par exemple rôle tournant de représentant des familles, cellules, communautés et territoires, ou élus tirés au sort choisis parmi des candidats volontaires (comme dans l’Athènes antique) …,
- transfert de plus en plus de pouvoirs aux mouvements associatifs locaux (sur l’exemple des monnaies locales),
- fin de la professionnalisation de la politique et des redondances des échelons administratifs et formation des représentants pour qu’ils puissent bien jouer leur rôle,
- remplacement des lobbies partisans par des comités de citoyens formés sur les sujets à traiter (cela se pratique déjà),
- création de nouveaux organismes comme le GIEC (10), qui a fait ses preuves, capable de traiter efficacement des problématiques de dimension mondiale,
- remplacement des instances actuelles de gouvernance mondiale (ONU, G20, …) par un vrai organisme représentatif des territoires et communautés, indépendant des états (11),
- réduction progressive des pouvoirs des états, …
Cette liste n’est pas exhaustive. Ces mesures doivent être adaptées aux systèmes de valeurs de chaque communauté, par exemple une autre forme politique que la démocratie est préférable dans certains contextes. Vrai Mondialisme signifie que, bien que les communautés et territoires aient des organisations et cultures différentes, ils sont tous reliés d’une façon la plus directe possible à la structure politique commune qui représente l’humanité.
Bien sûr, l’émergence d’une telle nouvelle organisation politique remet en cause beaucoup de pouvoirs et d’ambitions. Elle peut faire penser au communisme avec les dérives que nous connaissons. Nous surmonterons ces obstacles grâce à une transition en douceur, en tirant des leçons des transitions difficiles (printemps arabe, Ukraine,…) et des transitions relativement réussis (sortie de l’apartheid de l’Afrique du sud, chute du mur de Berlin et émancipation des peuples d’Europe de l’est, succès d’entreprises « libérées » (9), …), grâce au développement de l’Humanisme (e) et des Valeurs communes (f), mais aussi grâce à votre action personnelle en vous impliquant dans les communautés autour de vous pour y faire évoluer la « politique » dans un sens plus éthique et universel.
Valeurs communes
Le Vrai Mondialisme donne la structure politique. Le Développement Durable donne l’organisation économique et sociale. L’Humanisme donne les bases du savoir vivre ensemble. Tout cela fonctionnera si les acteurs de cette révolution s’adaptent sans violence, dans un esprit de partage et soudés par une spiritualité commune. Il ne s’agit pas ici de remettre en cause les religions ou croyance ou non croyance de chacun, mais de prendre conscience du potentiel point commun entre nous tous : l’Amour. L’Amour de la Terre, notre planète commune et unique, ou l’Amour de notre écosystème qui nous permet d’exister et de cohabiter, ou l’Amour de l’humanité, où l’Amour de l’autre, en fait tout cela revient au même.
Il est évident pour certains, et je suppose pour la plupart de ceux qui ont lu ce texte jusqu’ici, que notre écosystème est fortement dégradé par l’homme et que nous avons besoin d’une formidable énergie pour le sauver et le rendre plus vivable. La seule énergie à notre disposition, reliant les hommes et capable de rendre l’utopie décrite ci-dessus réalisable, c’est l’Amour.
Pour que cette vision se propage, il faut développer en grande échelle l’Éducation aux valeurs communes, d’une façon désintéressée et donc pas par les médias ou lieux d’enseignement sous contrôle politique, économique ou religieux obtus. Mais plutôt par des événements sans but lucratif, par la rencontre, par les échanges, par des actions communes, par l’apprentissage et la mise en œuvre de méthodes et pratiques que nous mettent à disposition les traditions et les sciences humaines qui regorgent de connaissances, de solutions et de méthodes auxquelles nous devrions tous nous intéresser avec curiosité, pragmatisme et esprit critique, pour passer ensuite à l’acte.
Mise en œuvre
Comment faire ? Comment y croire ?
En fait, il n’y a rien d’innovant dans toutes ces propositions, certes incomplètes, mais qui posent les bases d’un nouveau écosystème qui reste à peaufiner, expérimenter et co-développer. La plupart des pièces du puzzle sont là et des mouvements dans les divers domaines cités sont déjà en marche (12). Il n’y manque que plus de participants, plus d’engagement, plus de désintéressement, plus d’intelligence collective et plus d’Amour.
Globalement, nous avons besoin aussi d’une conduite du changement ambitieuse, pragmatique et apte à appréhender la complexité de la situation. Les solutions méthodologiques pour conduire cet immense changement existent (13), mais la bonne organisation avec les pouvoirs adaptés reste à construire.
A vous d’y contribuer, en participant aux mouvements en marche (12), en vous intéressant aux pistes citées dans les notes ci-dessous, en donnant votre avis par un commentaire dans cette page plus bas et en diffusant largement cet article dans votre réseau s’il vous séduit.
Didier - Citoyen du Monde
(1) : pour apprendre à s’aimer, découvrir la méthode The Work.
(2) : moyens pour comprendre les différences avec les autres : Process Com, Spirale Dynamique (in English), etc …
(3) : méthodes pour vivre la différence avec les autres : Process Com, Spirale Dynamique (in English), etc …
(4) : voir note dans ce blog Pour changer le monde changeons de Leader !
(5) : voir article dans l’Opinion Vers la Performance Globale par un management innovant.
(6) : voir note dans ce blog Entreprises en voie d’extinction.
(7) : voir note dans ce blog Prospérité sans croissance.
(8) : voir article « Objectifs climatiques et développements » de l’excellente revue Futuribles de mars-avril 2015
(9) : inspiré des principes de l’entreprise libérée, voir site web de MOM21
(10) : GIEC = Groupement International des Experts du Climat qui conseille techniquement l’ONU à ce sujet.
(11) : voir site web de l’Association des Citoyens du Monde.
(12) : voir note dans ce blog Incarnons l’Utopie !
(13) : voir méthodes de conduite du changement comme la Spirale Dynamique (in English), la Systémique, le Lean Management, l’Appreciaty Inquiry (in English), etc …
(a), (b), … : renvoient aux relations entre thèmes
Merci Didier d'avoir murit toutes ces propositions auxquelles je crois.
"Y a plus Ka" comme dirait l'autre.
Avec les amis, nous essayons et avons réussi à fonctionner dans une petite association basée à Paris et dont l’œuvre impacte le Bangladesh particulièrement.
Nous avons en prime le bonheur de travailler dans un ensemble transgénérationnel allant de 80 + jusqu'à de jeunes étudiant.
Association www.watever.org
Tous mes Vœux et affection à toi et ta famille.
Yves Marre
Rédigé par : Yves Marre | 03/05/2015 à 04:57
Merci Yves pour ton commentaire et bravo pour
votre projet !
Bonne continuation !
Didier
Rédigé par : Didier | 03/05/2015 à 15:59
bravo pour cet article et le schéma ... super clair
comme souvent, le pb c'est la gouvernance mondiale et la gouvernance par les états, chacun tirant la couverture à soi (avec un zeste de vision collective) ...
le problème c'est la diversité des situations
le problème ce sont les souffrances du passé
Heureusement Internet et le digital commence à faire bouger les lignes ...
la solution viendra des jeunes ...
Rédigé par : patrick | 05/10/2015 à 11:42
Oui, c'est ici que je poste un message en ce 9/11/2016 (jour d'élection de Donald Trump comme Président des USA). Il est 5h du matin ici. Les résultats vont « tomber ».
La démocratie est menacée, le monde va trembler.
Comme tant d’autres veilleurs, le matin je « prie d’abord ».
Et puis ce matin j’écris, sans attendre les informations.
Avec mon élan de démocrate, ma conviction fraternelle.
Avec le réalisme d'afro-américains de Harlem, je dis « nous devons rester confiants dans le processus démocratique ».
Michel de La Croix
Rédigé par : Michel de La Croix en Touraine | 09/11/2016 à 05:34